Lorsque les premières étoiles se mettent à briller au-dessus de Berne, Jos Kohn ouvre le toit du petit observatoire. Les deux moitiés de la coupelle s’écartent l’une de l’autre dans un léger ronronnement en glissant sur des rails. Le chercheur de 34 ans pointe le télescope en direction de la pleine lune. La vue qu’il dévoile est à couper le souffle: elle donne sur des cratères immensément agrandis. Le temps d’un instant, on a l’impression d’être un astronaute sur le point d’atterrir sur le satellite de la terre.
«Mais ce que je préfère observer dans le ciel nocturne, ce sont les amas d’étoiles que l’on ne pourrait pas voir à l’œil nu», confie Kohn. Avec son télescope, il vise un endroit où le firmament est très légèrement éclairé. On voit alors apparaître un nuage sphérique composé d’innombrables étincelles de lumière blanche. «Chacun de ces points est un gigantesque soleil», explique l’astronome. «Rien que d’y penser me coupe le souffle.»
Du Monte Generoso au Gurten
Les visiteurs et visiteuses auxquel-les Kohn montre le ciel étoilé une à deux fois par semaine au-dessus du Gurten sont aussi régulièrement subjugué-es. Depuis mars, on dispose pour cela d’un observatoire qui, vu de l’extérieur, n’a certes l’air de rien. Or, il possède un télescope sophistiqué et très performant. Les phénomènes célestes peuvent ainsi être agrandis jusqu’à 500 fois.
Le télescope de la montagne bernoise invite les amateurs et amatrices intéressé-es à s’envoler dans l’espace. Mais avant que cela ne fût possible, l’observatoire a lui-même dû décoller du sol: pendant un quart de siècle, l’observatoire se trouvait en effet sur le Monte Generoso dans le Tessin. Lorsque Migros y a fermé l’ancien hôtel pour construire à la place un nouveau restaurant d’altitude selon les plans du starchitecte Mario Botta, l’intérêt du public pour l’observatoire s’est peu à peu dissipé. En effet, lorsque le dernier train à crémaillère quittait le sommet pour la vallée, les étoiles étaient souvent encore absentes du ciel.
En mai 2021, l’observatoire d’un poids d’environ trois tonnes a été démonté et acheminé par hélicoptère dans la vallée. Puis il a été transporté par camion jusqu’en Suisse alémanique et reconstruit sur le Gurten. Le Pour-cent culturel Migros a permis à l’observatoire de renaître sur le Gurten et d’y trouver un nouveau public.
Tout d’un coup, nous nous sentons minuscules et nos soucis deviennent insignifiants.
Jos Kohn astronome
Mais le halo lumineux émanant de la ville de Berne ne gêne-t’il pas l’observation des étoiles? «La pollution lumineuse est bien moins importante que ce que l’on pourrait penser», explique Kohn. «Nous nous trouvons en effet au-dessus de Berne et les arbres et buissons qui entourent l’observatoire font écran.»
Les visiteurs et visiteuses peuvent ainsi contempler sans entrave le ciel nocturne à travers le télescope et s’imprégner du spectacle. «La vue offerte par le télescope ne laisse personne indifférent», assure l’astronome. «On peut se faire une idée de l’immensité de notre galaxie à elle-seule. Nous nous sentons certes tout d’un coup minuscules, mais nos soucis et tracas quotidiens deviennent aussi insignifiants. C’est pourquoi la contemplation du ciel étoilé peut apporter calme et sérénité.»
La passion des étoiles dès le plus jeune âge
Kohn est fasciné par l’espace depuis son enfance. Ce, bien qu’il ait grandi dans le village de Moutfort, situé à proximité de la ville de Luxembourg, où il ne fait jamais vraiment nuit: un aéroport ainsi qu’une prison munie de projecteurs se trouvent dans les environs. À ses dix ans, son grand-père lui offrit un petit télescope en plastique. «Il n’avait qu’un grossissement de 25 fois », se souvient l’astronome. «Mais cela suffisait pour apercevoir les anneaux de Saturne par une nuit claire d’automne.»
C’en était fait de Kohn: dès lors, il se consacra avec toujours plus de passion à la nuit étoilée et, adolescent, il investit son premier argent gagné dans l’achat d’un télescope plus performant. Plus tard, il étudia la physique et l’astronomie aux universités de Berne et de Fribourg.
Aujourd’hui, Kohn travaille certes à plein temps au sein d’une entreprise qui fabrique des accessoires pour réseaux à fibres optiques. Mais il donne également des cours à de futur-es astronomes à l’université de Fribourg. Il leur montre notamment comment la lumière des étoiles peut être séparée en ses composants et comment l’on peut en déduire l’âge de ces soleils ainsi que leur distance par rapport à la terre.
En signe de reconnaissance, un ami chercheur a même donné son nom, Jos Kohn, à un astéroïde récemment découvert. Le Luxembourgeois évoque cela au détour d’une phrase, comme si de rien n’était. Il préfère se tourner à nouveau vers le télescope et viser un nouvel amas d’étoiles.
L’observatoire de Gurten propose des visites une à deux fois par semaine. La coupole ne peut accueillir que 16 visiteurs et visiteuses à la fois, il est donc conseillé de s’inscrire le plus tôt possible.
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