Enfant, Viviane Chassot a longtemps et passionnément étudié la danse classique à l’opéra de Zurich – au point qu’elle aurait pu peut-être devenir une ballerine professionnelle virevoltant dans les airs avec grâce. Un informe et pesant instrument viendra paradoxalement déjouer ses plans. «Mon père jouait chaque année de l’accordéon à Noël, et c’est objet me fascinait», se souvient la jeune femme. Rien d’extraordinaire cependant à cela, du moins à Wollerau (SZ) où Viviane Chassot a grandi. «Dans ma classe, la moitié des élèves en jouaient aussi. Il y avait des orchestres d’accordéon et des concours. Cet instrument jouissait d’une longue tradition populaire.»
Mais si Viviane Chassot est attirée par celui qu’on appelle parfois le piano du pauvre, elle n’apprécie que modérément la musique folklorique qui lui colle aux soufflets. Le vrai coup foudre aura lieu un peu plus tard, quand l’adolescente alors âgée de 12 ans entend à la radio une œuvre de Bach à l’accordéon. «Ce jour-là, j’ai saisi qu’il était possible d’aborder d’autres genres musicaux et que c’est précisément ça que je voulais faire.»
Soutenue par ses parents qui voient que leur enfant se montre particulièrement studieuse et dispose de grandes facilités, la jeune femme intègre le conservatoire de Bienne puis celui de Berne dans la classe de Teodoro Anzellotti avec l’ambition de devenir une professionnelle de l’accordéon.
Pari réussi. Viviane Chassot a aujourd’hui réussi à percer et a déjà joué à la Philharmonie de Berlin, à la Konzerthaus de Vienne ou Guggenheim Museum de New York et a travaillé avec des chefs comme Sir Simon Rattle et Riccardo Chailly.
Aujourd’hui, en plus de sa carrière d’instrumentaliste, Viviane Chassot enseigne aussi au Conservatoire de Winterthur. «Outre l’apprentissage de la technique, j’accompagne mes élèves sur leur chemin personnel. Ils doivent trouver la musique qui leur ressemble ainsi que l’étincelle qu’ils ont entre eux. Ainsi, seulement, ils pourront transmettre leur flamme, leur passion au public.»
Accordéon mon amour
Si Viviane Chassot aime l’accordéon, c’est parce qu’il permet une large gamme de sons et peut se montrer aussi léger que grave. Ce n’est pas tout: «C’est instrument a une âme avec ses soufflets qui le font respirer, s’exclame Viviane Chassot. Quand on en joue, on forme un tout avec lui. J’aime le sentir contre mon cœur.»
Une femme exploratrice
«Je travaille moi-même les transcriptions des œuvres de Mozart, Bach ou Haydn pour l’accordéon. Ce peut être un long processus. Certains passages qui ne font que quelques mesures peuvent me prendre plusieurs jours. De plus, je ne sais jamais en commençant si je pourrai transposer toute la partition.» Il faut dire que la musicienne joue ici les exploratrices et ne peut compter sur aucun repère. «Personne avant moi n’a transcris par exemple les concertos pour piano de Mozart à l’accordéon, et c’est un grand stress quand arrive le jour des répétitions avec l’orchestre. A ce moment-là seulement, je sais si le pari est gagné.»
Une musicienne sans frontière
Pour Viviane Chassot, l’accordéon est un instrument universel, qui se prête à tous les styles. «On peut notamment jouer de la musique contemporaine, du jazz, des œuvres de tango. Rien n’est impossible. Et puis, j’aime beaucoup l’idée de construire des ponts entre les genres.» Multi-talent, Viviane Chassot ose aussi se lancer dans le périlleux exercice de l’improvisation. «J’aime certes suivre la structure qu’offre une partition, mais j’aime aussi beaucoup m’en libérer pour aller à la recherche des mélodies et de nouveaux sons.»
Appréciée du public et de la critique
«A la fin d’un concert, il arrive souvent que des gens viennent me voir pour me dire que je leurs ai fait découvrir un nouveau monde et qu’ils ne pensaient pas qu’il était possible de jouer de la musique classique à l’accordéon», explique Viviane Chassot. Le public n’est pas le seul à s’intéresser à la musicienne. Sony Classical l’a aussi approchée, et la Bâloise d’adoption de devenir la première accordéoniste à avoir signé avec ce label, qui a sorti deux CDs salués par la critique. Enfin, ses pairs apprécient également son travail au point que l’an dernier, Viviane Chassot a reçu le Prix suisse de musique. «Cette récompense m’a beaucoup touchée car elle montre que la profession apprécie ce que je fais. Elle est aussi venue à point nommé, soit au sortir d’une longue maladie et en pleine pandémie. C’était pour moi comme une lumière à l’horizon.»
Invitée par le Pour-cent culturel Migros dans le cadre des concerts clubs live, Viviane Chassot sera en concert à Berne, Lucerne et Zurich, en duo avec Martin Mallaun à la cithare. Programme et billetterie: club-konzerte.ch.
Photos: Kostas Maros
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